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Aven du Calernaum : Présentation du gouffre et de ses réseaux

Publié le par Lucas

L'aven du Calernaum est une cavité majeure des Alpes-Maritimes. Il s'agit du gouffre le plus profond du département, en excluant la zone du Marguareis (J.Y Bigot, 2004), avec - 481 mètres de profondeur et environ 10 km de développement. 

Ce gouffre s'ouvre sur le plateau de Calern, situé sur les communes de Cipières et de Caussols. Il n'est pas le seul grand trou du plateau puisque, dans la même zone, s'ouvrent les avens du Baoudillouns, des Moustiques et du Nhrelac. Ces 3 derniers sont reliés entre eux, les avens du Baoudillouns et des Moustiques ont été jonctionnés en 1999. Quant au Nhrelac, il a été découvert en escalade artificielle depuis les galeries des Moustiques et a été intégralement remonté jusqu'à s'approcher de la surface, donnant lieu ensuite à une ouverture artificielle. Pour l'anecdote, le trou se nomme : Neva de Nhrelac, soit Aven de Calern à l'envers. Le Calernaum n'a, à ce jour, pas été jonctionné avec ses 3 voisins malgré une proximité certaine. On parle du système souterrain de Calern.

Le Calernaum est divisé en plusieurs parties : 

- Les puits d'entrée allant de 0 à - 200 mètres environ. Il s'agit d'une succession de verticales de belles dimensions, avec notamment un puits de 80 mètres. Le développement horizontal y est quasi inexistant. 

- La galerie de l'Odyssée : elle démarre immédiatement à -200 mètres, au terminus de la série de puits, et est le point de départ des différents réseaux ou branches du gouffre : I, II, III et IV.

- Le réseau I : il s'agit du réseau qui se dirige vers les Moustiques et qui présente le plus grand nombre de difficultés. Il se compose de la galerie des Dolmens, de la salle des Magots, de la galerie des Druides, les Mounta Cala, la galerie des Cônes, le puits JB, les galeries du Vent, des Pas de Blèmes, des Montagnes Russes et de l'Haré Fisma, terminus du réseau. 

- Les réseaux II et III : réseaux les plus visités en sortie classique, plus agréables et moins glaiseux que le I. Il se compose des galeries Ali Baba, Mammouth, Elephant, les Profanateurs, la Chapelle Sixtine, la Clue et le méandre des Funambules. Le réseau II est notamment terminé à son aval par le siphon I (plongé) et le siphon des Funambules.

- Le réseau IV : lorsque le siphon des funambules du réseau II a été plongé, il a été découvert plusieurs centaines de mètres de galeries en post-siphon, avec d'importants volumes et du courant d'air. Cette prolongation du réseau II a été nommée réseau IV.

Source : Sop.inria.fr  (click gauche sur l'image pour agrandir). Cette topographie publiée en 1994 par le spéléo club Laurentin ne présente pas le réseau IV, ni les galeries du Vent, Pas de Blèmes et Haré Fisma.

Source : Sop.inria.fr (click gauche sur l'image pour agrandir). Cette topographie publiée en 1994 par le spéléo club Laurentin ne présente pas le réseau IV, ni les galeries du Vent, Pas de Blèmes et Haré Fisma.

Rapide historique :

L'entrée du Calernaum a été découverte et désobstruée en 1986 par Pavel Amico et Marc Margaillan. Ils explorent la cavité jusqu'à - 60 mètres, au bas du puits nommé aujourd'hui le "puits du Pendule". Le courant d'air est alors perdu et le gouffre tombe dans l'oubli. 

En 1989, le spéléo club Laurentin (SCL) reprend le chantier et découvre une continuation en pendulant à mi-puits vers -50 mètres. Il désobtrue un boyau ... le gouffre se révèle alors. Les grandes découvertes vont s'enchaîner à toute vitesse :

- Découverte des puits jusqu'en bas du Goliath (P80) vers - 200 mètres.

- Découverte du réseau I jusqu'à la salle des Magots. 

- Découverte du réseau II jusqu'à son siphon "final" nommé S1, au bout de la Clue. 

- Fin décembre 1989, découverte du passage sous les Magots et poursuite de la première jusqu'au bas d'une escalade de 28 mètres... la future porte d'entrée des Mounta Cala. Côté réseau II, découverte du méandre des funambules jusqu'à un siphon.

 

En mai 1990, une bifurcation est découverte dans la galerie Ali-Baba du réseau II, c'est là le début du réseau III et de la galerie des Profanateurs. 

En juin 1990, les grandes découvertes ne sont toujours pas finies. Didier Sessegolo plonge le siphon des Funambules et découvre 1200 mètres de galeries qui seront nommées réseau IV.

De son côté, Jean-Claude Marie escalade la cheminée de 28 mètres du réseau I et découvre les Mounta Cala, la galerie des Cônes, le puits JB et la galerie qui fonce vers le siphon III à la côte - 481 mètres, point bas du gouffre. Ce sont 1000 mètres de galeries neuves ajoutées au réseau I. La plongée du siphon III ne donnera rien (bloqué sur impénétrable). 

Quelques semaines plus tard est réalisée l'escalade surplombant le siphon III, cette escalade de 40 mètres permet d'accéder, après une étroiture pénible en trémie au sommet de l'escalade, à une nouvelle galerie fortement ventilée, qui est nommée la "galerie du Vent". 

Les explorations ralentissent fortement aux réseaux II, III et IV. Cependant les esprits s'échauffent pour le réseau I, qui se rapproche de plus en plus du gouffre des Moustiques/Baoudillouns/Nhrelac. En 1994 est découverte la suite de la galerie du Vent, à savoir, les galeries Pas de Blèmes, Montagnes Russes et Haré Fisma. Désormais nous sommes à moins de 100 mètres de l'autre réseau, et le courant d'air est toujours présent !

Cependant, la jonction ne sera pas faite, et ce pour plusieurs raisons :

- Le terminus de l'Haré Fisma est un siphon boueux.

- Le courant d'air se perd dans l'Haré Fisma.

- La plupart des "?" sont des obstacles pénibles demandant un certain engagement.

- Mais surtout, un aller-retour au fond de l'Haré Fisma demande 24 heures de progression pénible, boueuse et fatigante. Les équipes sont rincées et petit à petit l'espoir de la jonction meurt en passant par le Calernaum. Les spéléos clubs ACN et Martel travailleront beaucoup côté Nhrelac mais, malgré un courant d'air présent, ils n'arriveront pas non plus à faire la jonction... Un essai de jonction sonore est réalisé et ne donne pas de résultat.

L'an 2007 voit l'arrêt définitif des explorations au Calernaum. 

Vue sur le plateau de Calern (au premier plan) et doline d'entrée du Calernaum
Vue sur le plateau de Calern (au premier plan) et doline d'entrée du Calernaum

Vue sur le plateau de Calern (au premier plan) et doline d'entrée du Calernaum

La reprise des explorations au Calernaum

En 2021, Manon Perrot et moi-même avions pour projet de reprendre les explorations au Calernaum, notamment au réseau I. Nous avons donc rassemblé tous les spéléologues intéressés, quels que soient leur club et département, et nous nous sommes fédérés autour d'un nom nous rassemblant : le Collectif Calernaum. Manon et moi avons ensuite monté un projet en 2022, soutenu par plusieurs instances de la spéléologie. Les buts sont multiples :

- Favoriser les liens interclub.

- Booster la dynamique d'exploration départementale.

- Reprendre les explorations du réseau I du Calernaum dans le but de chercher la jonction, tant rêvée, avec les Moustiques.

Mais également, la proposition de ce projet a permis à d'autres spéléos d'avoir eux aussi des objectifs dans le gouffre. C'est ainsi que d'autres membres du Collectif ont formé une team qui travaille au réseau II. Et Bergil (pseudonyme) a initié un énorme travail de synthèse topographique sous Thérion du gouffre. 

 

En 2 ans, j'ai effectué plus de 20 descentes dans le gouffre. Au terme de 12 mois après le début officiel du projet, ce sont 11 sorties qui ont été réalisées, réunissant plus de 16 participants différents. Cet article est donc le premier d'une longue série, correspondant aux missions du Collectif sur ce magnifique gouffre qu'est le Calernaum. 

Bivouac lors d'une exploration du Calernaum en septembre 2021

Bivouac lors d'une exploration du Calernaum en septembre 2021

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